À l’heure !
Toulouse, décembre 2018.
Une feuille de papier adhésive, l’inscription d’un horaire aussi lisible que visible, et c’est parti ! Dans ce hangar, toutes celles et ceux qui souhaitent accéder aux trampolines doivent préalablement arborer cette affichette sur le torse. Le découpage du temps en unités finies et son affichage public sont depuis longtemps des opérations fondamentales à l’organisation des activités et à la coordination des personnes. L’horloge de l’église placée au centre du village scandait aussi bien les rythmes de travail que les moments de recueil religieux. Les gares sont également rythmées par une préoccupation omniprésente du temps incarné dans les horloges synchronisées et les panneaux affichant les horaires de trains. Les espaces de travail comme les usines d’hier ou les call centers d’aujourd’hui sont eux aussi peuplés d’inscriptions qui rappellent sans cesse à l’ordre temporel. Qu’il s’agisse du taylorisme ou des formes d’organisation soumises aux exigences du juste à temps, les activités productives riment avec une incessante course contre la montre. À l’ère des affichages dynamiques et des smartphones, à quoi bon cette affichette imprimée et disposée sur chaque corps ? C’est qu’ici aussi le temps, c’est de l’argent. Le tarif de la partie de trampoline équivaut à une durée déterminée : une heure, dont le début et la fin s’enclenche chaque quart d’heure. Une fois que l’horaire affiché sur l’horloge murale correspond à celui inscrit sur les torses, toutes les personnes concernées doivent s’éjecter de l’aire de jeu. L’affichage public individualisé est redoutable : tout dépassement est immédiatement repérable et potentiellement qualifié de resquille.