Ça compte pour de vrai
Paris, juin 2010.
Ça ressemble à un cahier de premier de la classe : écrit lisiblement et avec soin ; l’espace de la page est maitrisé à merveille ; rien à dire, l’écrit se déploie de gauche à droite, de haut en bas avec régularité. Parfois, on croirait que l’inscription a été réalisée mécaniquement tant la taille des lettres et la graphie sont harmonieuses. Cette double page ressemble à une mise au propre d’un manuscrit de poète, un coup de dés jamais …
Quand on prend la peine non plus de regarder l’écrit mais de le lire, on découvre que l’objet fascinant est un livre de compte ; des pages et des pages de chiffres soigneusement placés dans des colonnes correspondant à des lignes particulières ; ils composent ensemble un tableau ; celui-là n’est pas fait de concepts comme celui du philosophe, mais d’une mise en chiffre d’une réalité : l’activité d’une petite entreprise en janvier 1954.
Mais voilà, ce tableau mensuel de l’activité de la petite société familiale ne doit pas comporter de ratures car sinon c’est son existence même qui sera compromise. Ne pas raturer ni arracher de pages à ce registre sinon on pourra estimer le tableau truqué, le quotidien du commerce factice. Bien écrire, ce n’est pas pour faire joli mais c’est au cas où on ait un problème, au cas où l’activité serait moins forte, on ne croit pas que c’est pour de faux.