Cela va sans dire
Hossegor. Août 2009.
Il n’est pas toujours besoin de partir à l’autre bout du monde pour faire naître ces moments de décalage si heureux, qui font soudain, dans l’œil de celui qui veut bien s’y laisser aller, une lumière nouvelle sur les actions de l’écriture. Il suffit parfois d’arpenter les mêmes rues, celles qui à pied ou à vélo ont fait le bonheur de nos vacances depuis toujours. Depuis quand ces panneaux « en ville, je m’habille » sont-ils là ? Impossible à dire. À croire qu’ils ont été placés exprès pour scriptopolis. Et comme eux, on sourit en prenant la mesure de ce qu’ils font.
Pas grand chose en fait : un simple rappel. Il est convenable, légal, de porter des vêtements en public. Ils n’exigent même pas une tenue correcte. Juste une tenue. On imagine la série d’événements, de réunions, de débats qui ont amené à ce que cette petite évidence fasse l’objet d’une série de panneaux installés aux quatre coins du centre ville. On se dit aussi que si panneaux il y a c’est sans doute que l’évidence n’a pas été jugée assez forte, assez partagée. On continue d’avancer dans la rue, ne perdant pas de vue la pâtisserie de laquelle on sortira tout à l’heure avec le meilleur gâteau basque de la région, et l’on se trouve vite plongé dans un abîme sans fin. Combien de panneaux de ce genre faudrait-il pour rappeler les principales évidences qui nourissent notre monde ? Combien d’allant-de-soi pourraient ainsi devenir affiche ? En ville, je regarde devant moi sans fixer trop longtemps mes congénères. J’avance sur mes pieds. Je ne tue personne. Je pense à respirer.
Pour couper court au vertige, on note finalement sur le ticket de caisse que l’on glisse ensuite dans la poche arrière de son bermuda « relire les deux premiers chapitres des Ethnomethodology Studies de H. Garfinkel ».