Debout
C’est dans les premières pages du Deuxième sexe, « Enfance » : un des événements fondateurs qui fait prendre conscience aux petites filles de leur différence (le trop fameux complexe de castration) serait l’impossibilité d’uriner debout. En 2018, il y a plusieurs manières d’envisager la cure dudit complexe. La piste différentialiste que tout le monde connaît de la double porte des WC, ladies and gentlemen, comme il y eut black and white dans les États ségrégationnistes ; portes pour lesquelles certains mouvements estudiantins se sont battus, chronomètre au poing, afin d’imposer de savantes équations différentielles (4 ladies and 1 gentleman plus 2 urinals). Ou bien, la piste cyborg, émergente, qui passe par l’équipement d’un pisse-debout, ces nouvelles prothèses qui fleurissent des chantiers aux festivals. Il y a enfin la piste universalo-scandinave : un WC pour toutes et tous, puisque c’est le plus petit dénominateur commun et que la position assise, vectrice de plus de précision, garantirait une meilleure hygiène et un plus grand respect pour le personnel d’entretien.
Bien. Ceci étant dit, on s’étonnera que les villes (dont on a cru depuis les années 1970 qu’elles avaient adopté avec les sanisettes la piste universaliste) reculent et ré-installent des urinoirs dans certains endroits réputés sales — ici l’abord d’une gare. « À quand un urinoir féminin ? » interroge le graffiti. Bientôt peut-être, mais ce qui est certain c’est plus d’un siècle après le test de la Fontain de Richard Mutt alias Marcel Duchamp, l’objet public urinoir reste le sujet de vives controverses.