Déménagement. Épisode 2 : Funèbres cartons
– Paris, rive gauche. Mars 2009 –
La mise en carton constitue, après le tri (voir l’épisode précédent), le second grand moment du déménagement. Mettre le monstre de papier en boîte est moins simple qu’il n’y paraît. D’abord, les écrits ont leurs cartons spécifiques : livres et dossiers iront dans des boîtes plus petites qui, lors du chargement du camion, seront soigneusement rangées. Ensuite, faire un carton d’écrits consiste à reproduire un geste d’archiviste, celui d’extraire du monde des vivants un ensemble d’objets. Soudain, avec cette mise en carton systématique, c’est toute sa vie de papier (personnelle, professionnelle, administrative) qui disparaît. Lorsque le camion part, avec son chargement d’archives et qu’il n’est pas encore arrivé sur l’autre rive, un étrange sentiment peut vous traverser : une intense impression de liberté. Le carton a enfoui les traces de la vie passée, désormais la page est blanche, tout est à écrire.
Mais cette « extraction » peut aussi produire des angoisses considérables, jusqu’au sentiment d’être soudain mort, … d’être empaillé à jamais.