Toute de suite
– M6 (Lancaster – Manchester). Avril 2009 –
Plier, déplier. Deux opérations fondatrices de tout monde commun.
Que dit un panneau “virage dangereux” ? Que fait-il ? Qu’y trouve-t-on replié ? La question est éminemment difficile et le vaste territoire de ses réponses dit beaucoup sur ce que c’est qu’une société. On pourrait, pour savoir, faire des expériences. Demander le plus simplement possible à celui qui le croise ce qu’il en pense. Peut-être que le panneau avertit et déclenche ainsi des stratégies. Ou brancher des sondes sur les conducteurs. Et mesurer leurs mouvements, leur rythme cardiaque, leur transpiration. Peut-être que le panneau met dans un certain état et prépare ainsi à la délicate manipulation du volant, de la pédale de frein, voire du débrayage. Si l’on oublie un peu l’éthique, on pourrait aussi observer le même genre de comportement lors du passage d’un virage dangereux dont on aurait enlevé le panneau annonciateur. Au nombre d’accidents, de dérapages, on saurait ce que vaut le dit panneau.
Ou alors, on peut partir. Faire encore une fois advenir un petit décalage, quelques kilomètres et les objets d’une autre culture. Car chez d’autres toute cette ambiguïté n’est pas très appréciée. Il faut préciser. Et là, le panneau n’apparaît pas seulement tourné, si l’on ose dire, vers la suite. Il n’est pas tant à lire au futur qu’au présent. À l’impératif. Le panneau invite à freiner maintenant, c’est-à-dire ici.