Énoncé savant
Montpellier, septembre 2018.
Reconnaitre, c’est connaitre à nouveau, savoir ce que l’on a connu à un moment antérieur. Mais lorsqu’il s’agit de la « reconnaissance d’avoir pris connaissance », la boucle réflexive devient plus subtile. On connait à nouveau le geste préalable qui nous a permis de connaitre auparavant… La difficulté augmente encore d’un cran avec le « Je », sujet de l’énonciation. Le scripteur s’adresse à lui-même, dans un mouvement réflexif. Jusqu’ici, rien de plus banal. Mais la forme affirmative, plutôt qu’interrogatif, relance d’autant l’intrigue. Depuis que certains objets sont communicants, le référent du « Je » n’est plus évident : il oscille potentiellement entre une personne face à cet écran et l’automate qui s’adresserait à l’usager. Mais l’introduction de la deuxième personne du pluriel afin d’appuyer sur une touche en vue de poursuivre déplace encore un peu la portée de la reconnaissance à l’œuvre. On connait à nouveau ce que l’on a su après un apprentissage, et il faut en attester (soi-même ou un « vous » adressé à quelqu’un d’autre) par un geste à la fois technique (presser la touche) et juridique qui équivaut à une signature : en appuyant je valide que je sais ce que j’ai fait. Agir en connaissance de cause (ne pas s’attendre à recevoir de monnaie si on ne fait pas l’appoint), et on comprend bien pourquoi (éviter les recours ou que l’usager, énervé, détériore l’automate). Mais à quoi bon un énoncé aussi savamment alambiqué ?