Entendement sur le trottoir
Consternée par l’absence de représentation réaliste du clitoris dans les cours dispensés dans l’enseignement secondaire et dans la formation des soignants, en 2016, Odile Fillod a modélisé, sur la base de la littérature scientifique, un organe génital imprimable en 3 D. Ce petit objet souple en deux nuances de rose, conçu dans le fablab de la Cité des sciences et de l’industrie et duplicable avec une imprimante a participé à attirer l’attention de larges publics sur un organe moins documenté que son équivalent masculin et donc, en creux, sur les visions phallocentrées du corps et de la sexualité des femmes. Prolongeant une tradition féministe visant à montrer les enjeux politiques de la vie privée et mettre à l’agenda le façonnement des corps et de la sexualité, en quelques courtes années, le clitoris en 3 D est devenu un support de transmission de connaissances sur la gestion du plaisir et du désir sexuel chez les humains, autant qu’un symbole féministe. Pour que le clitoris soit de toutes les consciences, en complément de la nécessaire refonte des manuels scolaires, des collectifs féministes et des artistes réalisent régulièrement des pochoirs sur les trottoirs.
Soyons optimistes en 2024 : la mise à disposition des matrices sous licence cc-by-sa-nc, le faible coût de production de la surface à découper, la simplicité des gestes — apposer, appliquer la peinture, décoller et recommencer plus loin — et les pratiques d’effacement des graffitis aujourd’hui focalisées sur les murs feront peut-être en sorte qu’au XXIe siècle la conscience de l’organe sexuel féminin fera partie des catégories de l’entendement ordinaire des membres de la société. Scriptopolis a d’ores et déjà hâte de découvrir les gribouillages des générations à venir !