Fleurs de tramway
– L’invitée du vendredi : Clara Lamireau –
Paris. Avril 2009
Derrière la vitre de l’abri, sur la ligne du tramway des Maréchaux au sud de Paris, la ville défile. Les passants passent, les colonnes Morris présentent les derniers spectacles à la mode, les voitures grillent des feux rouges.
Le système d’information en ligne annonce aux voyageurs sept minutes d’attente. Sept minutes, pour une Parisienne en vadrouille, c’est long. Le regard qui portait de l’autre côté de la vitre s’accommode nonchalamment pour une vision de près et une lecture des mots imprimés sur le verre.
Les rues de la ville en calligrammes forment des ramures, des tiges, des corolles. Entre les lignes, des histoires de fleurs. Ici, les pétales de coquelicots servent d’indice à l’interprétation d’un oracle. Le secret sera-t-il bien gardé ?
Au moment de la construction de cette ligne de tram, la RATP a confié au plasticien Patrick Corillon le soin de mettre en valeur le mobilier urbain, donnant libre cours à ses « dispositifs narratifs » issus de « l’imaginaire collectif », comme le souligne la présentation de cette œuvre en station.
Des légendes urbaines pour des espaces verts d’un nouveau genre, en somme. La voyageuse pressée est alors transportée par sa lecture, du boulevard Brune au champ de coquelicots de son enfance. Une photo prise par sa grand-mère, quand elle avait 9 ans. L’odeur du jardin, les grands arbres sur lesquels elle grimpait pour imaginer des aventures, le potager de sa mère et de sa voisine Zorrha. Le tram arrive, s’arrête et redémarre, le flot des voyageurs sort la lectrice de sa rêverie. C’est reparti pour sept minutes d’attente.