Avec et sans papiers
Clamart, mai 2012.
Son premier dessin, quelques heures après être entrée pour la première fois dans sa nouvelle chambre. Je m’étais imaginé que ce type d’affiche arriverait après des cris, des larmes et des portes claquées. Mais non. Elle souriait quand elle a écrit ce joli mot, très poli. Tout comme son frère lorsqu’il fit le sien. Et les jours suivants, nous avons pu les entendre frapper doucement à leurs portes respectives, le mot toujours en place, demandent s’ils pouvaient entrer. Dans la plupart des cas, la porte s’ouvrait.
Quelques jours plus tard, nous avons remarqué des changements. Ils avaient rédigés de nouveaux petits mots. Ceux-ci n’étaient pas faits pour les chambres, mais pour les visiteurs. Ils étaient très secrets à leur propos : nous n’étions pas autorisés à regarder ces papiers. D’après ce que l’on pouvait entendre, c’était des laissez-passer, faits exclusivement pour leur propriétaire, avec leur nom et un mot de passe.
Nous nous sommes dits que décidément, nous avions bien là des enfants de scriptopoliens, qui ne faisaient pas seulement l’expérience de leurs nouvelles chambres séparées grâce aux murs et aux portes, mais aussi avec des écrits, des papiers qui identifiaient les lieux et les personnes. Fabricant de nouveaux processus de circulation. Nous étions fiers, d’une certaine manière, mais aussi un peu effrayés, même si nous trouvions tout cela beaucoup plus agréable que des cris ou des portes bloquées. Que penser de tout cela exactement ? Nous n’en avions pas la moindre idée jusqu’à ce qu’un jour nous entendions les paroles les plus belles qui soient. Toc toc. Oui, qui est-ce ? C’est moi, N. OK, tu peux rentrer, même sans papier.