Bon pour l’abattage !
Forêt de La Gagère, été 2009.
Enfant, j’aimais les matins d’été où nous partions avec le garde et mon grand-père marquer les arbres. Nous étions allés la semaine précédente nous promener dans la parcelle ; l’air de rien, le vieil homme chaussé de ses « Patogas » et armé d’une canne avait levé les yeux vers les cimes ; il avait choisi ceux qui iraient à la scierie à l’automne. Quand nous remontions en forêt par le grand chemin, les dès étaient déjà jetés, il fallait juste l’inscrire. Lui avait un carnet, je tenais quant à moi un drôle d’instrument de métal ; le garde avait à la ceinture une hachette et un étrange marteau semblable à une boule de machine à écrire. Quand mon grand-père sans dire un mot désignait l’un de ces gros arbres, il prononçait d’une voix sèche : « 20 mètres », tandis que le garde et moi mesurions le diamètre de l’arbre en question avant d’écrire tout cela sur un petit carnet. Puis, un coup de hachette arrachait un morceau d’écorce du sapin, laissant apparaître une surface presque blanche, qui de loin pouvait faire croire un instant à un œil ; bien vite, le garde d’un coup du marteau signait notre crime. A midi, quand la chaleur devenait irrespirable, et la parcelle suffisamment balafrée, nous pouvions redescendre contents de notre page d’écriture forestière.