L’amour à la française
Dans le TGV entre l’Italie et la France, novembre 2018.
Le train s’était arrêté peu avant la frontière pour laisser monter des agents de la Police et de la Douane, engoncés dans d’épais uniformes noirs. Alors que le train redémarrait, ils passaient dans les voitures, sélectionnant d’un rapide coup d’œil les candidats au contrôle d’identité et les bagages que leurs propriétaires allaient devoir déballer sous le regard méfiant des douaniers. « — Rapidement s’il vous plaît, le train attend ».
Deux policiers se sont rapprochés d’un passager. Me tournant le dos, ils laissaient apparaître la crosse de leur arme. L’une des deux était marquée au correcteur blanco, « AIMÉ », peut-être du prénom de son propriétaire. Je ne sais pas ce que la sociologie révèlerait du choix d’un tel prénom mais, dans ces circonstances, qu’un dérivé du verbe aimer soit inscrit sur un tel instrument me donne une profonde impression de malaise. Le scripteur qui a pris soin de ne pas graver l’arme fournie par l’institution mais de la marquer d’un liquide blanc, grattable, n’y aurait-il pas songé ?