ISSN : 2266-6060

Ici, avant

Toulouse, mai 2018.

Un bâtiment, une inscription. Et le lecteur est projeté dans un autre espace-temps. C’était ici, dans ce lieu précis, face à nous. La tour n’est plus là, encore moins son système de télégraphe optique : ce moyen de communication visuelle et à distance procédant par découpage des messages à l’aide de bras articulés en bois de différentes couleurs afin de réaliser un nombre codifié de signaux. Cette technologie de communication permettait de distinguer des signaux de correspondance entre plusieurs villes, et des signaux de régulation pour indiquer l’urgence du message, l’absence des agents, ou les conditions météorologiques difficiles. Disparus également les deux pirates de l’information, hommes d’affaires et spéculateurs, qui avaient détourné la technologie afin de connaitre avant tout le monde les cours de la rente à la Bourse de Paris. La ligne Bordeaux-Toulouse-Avignon n’est plus là non plus, tout comme le dense réseau des 534 tours qui jalonnaient le territoire français sur 5 000 km en 1844, seules quelques tours ayant été préservées, voire classées monuments historiques.
Toutes ces absences sont pourtant en partie repliées dans cette inscription – et le vaste corpus textuel et photographique qui documente le télégraphe optique de Claude Chappe. Loin d’être totales, ces absences résonnent encore un peu de nos jours avec d’autres technologies de communication. En scruter une en détail, c’est repérer la codification des inscriptions organisées en réseau, et l’agencement de conventions, de matériaux et de quelques personnes autorisées, sans contrôle absolu des usages détournés ou des faussaires. C’est aussi en apprendre un peu sur celles qui la précèdent ou lui succèdent dans le mouvement historique des empilements infrastructurels. Une simple inscription, et c’est potentiellement tout un monde qui se découvre.



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