Le parc, épisode 1. Merveilleuse maman
New York, été 2010.
On tomba dessus en entrant dans Central park, juste en sortant du Metropolitan Museum ; dans le hall du musée on avait bien sûr remarqué le panneau en bonne place ; c’était la longue liste des donateurs : des centaines de noms les uns en dessous des autres. Parmi ces noms, il en est certains que l’on retrouva dans une salle qui soudain ne portait plus de numéro ni le nom d’un peintre ou d’une sculpteur… Mais le nom de l’auteur du beau geste.
À l’hôpital où nous allions plus tard dans l’après-midi, dans la salle d’attente, au dessus de l’aquarium, il y avait aussi une petite plaque avec encore un autre nom ; sans doute, était-ce celui de la famille qui avait donné l’argent nécessaire à l’achat des poissons et du bocal afin de distraire les malades et leurs proches. On imagine mal que ce soient ces donateurs qui aient offert l’aquarium et choisi chacun des poissons. Donner doit avoir des limites. L’important, c’est d’avoir son nom.
Mais cette petite plaque métallique à l’entrée du parc ne portait pas d’identité ; elle avait été soigneusement vissée dans la planche de bois ; on pouvait y lire, sans même se pencher, une inscription évoquant seulement la figure d’un être aimé anonyme. À regarder autour, on comprit qu’en échange d’une somme d’argent finançant l’achat d’un banc public, on pouvait disposer d’une plaque où graver le message qu’on souhaitait. L’anonyme donateur avait préféré plutôt que d’inscrire son nom (ce qui aurait pu apparaître aussi vulgaire qu’un prix laissé sur un cadeau) évoquer sa merveilleuse mère, sans doute morte quelques semaines auparavant. Il avait transformé soudain une chose vulgaire en acte d’amour ; amour pour l’être disparu mais aussi amour du parc, de son embellissement permanent. Par ces deux lignes d’écriture, l’image d’une vieille femme nous apparut, assise là, souriante, profitant de la fraîcheur des arbres en ce milieu d’été torride.