Le Port, épisode 2. Dissuasion nucléaire
Cherbourg, mars 2012.
Non loin de la gare maritime de Cherbourg, celle qui fut construite au début du siècle lorsqu’on imaginait que le port allait devenir le point de départ des transatlantiques — ce fut Le Havre… depuis 2002, il y a un étrange monument de 128 mètres de long sur 10,60 mètres de large. Il est gris anthracite. Au début, on ne comprend pas de quoi il s’agit : d’une sculpture d’art contemporain ? d’une architecture utopique ? L’intrigue devient plus grande encore quand sur la partie la plus haute, on lit les mots peint en blanc sobrement : « Le redoutable ». On se dit qu’on a affaire à un monstre marin et là on ne se trompe pas beaucoup quand on apprend qu’il s’agit d’un Sous-marin Nucléaire Lanceurs d’Engins (SNLE), le premier sous-marin de ce type, Lancé le 29 mars 1967, par le Général De Gaulle qui fut admis au service actif le 1er décembre 1971, « équipé de 16 missiles balistiques M1 (450kt sur 2000km), puis M2 à partir de 1974, puis de missiles M20 comportant chacun une tête nucléaire d’une mégatonne et d’une portée supérieure à 3 000 km. ». Deux équipages de 135 hommes chacun (120 hommes et 15 officiers), les « Bleus » et les « Rouges » se relayaient pour que le bâtiment soit opérationnel 24h sur 24h, 365 jours sur 365. C’est le premier navire de ce que l’on appelait alors la dissuasion nucléaire. Reste le choix de son nom. Il participe totalement de cette logique d’effroi. Il fallait faire peur y compris par le nom du sous-marin. Mais sur qui s’exerçait cet effroi, assurément ni sur les ennemis potentiels qui ne devaient pas croiser le navire (sa position étant toujours tenue secrète), ni sur les poissons qui ne savent pas lire (du moins le français)… Les seuls à voir cette inscriptions étaient les autres marins, ceux de Brest où le sous-marins était basé. La méthode Coué en somme. Nous ne craignons rien ; nous sommes les plus fort, la preuve c’est écrit.