ISSN : 2266-6060

Les espaces démultipliés de la dédicace

Dunkerque, juin 2023

La signature est une forme graphique qui aide à faire circuler certains écrits. En les dotant d’une trace manuscrite, elle les chargent d’une présence. Parmi les formes très variées qu’elle peut prendre, celle de la dédicace est très particulière. Elle n’associe pas une personne à un objet scriptural réputé unique, mais transforme un bien de l’industrie culturelle en exemplaire singulier. Pour peu que le nom de leur autrice gagne en réputation au fil des années, ou que le lien entre celle-ci et la personne propriétaire du livre qu’elle a écrit — et signé — soit fort, cet exemplaire peut même devenir précieux, le temps et la mort venant parfois accentuer encore sa cote, affective ou financière. À l’inverse, on s’amuse à retrouver ces mêmes exemplaires signés dans les bacs de livres d’occasion, qui rappellent que l’ouvrage sait aussi poursuivre son chemin et redevenir anonyme si la valorisation de l’autographe a échoué.
Mais, comme toute signature, la dédicace est aussi un geste. Et à l’heure des réseaux sociaux et de la multiplication des formes de communication institutionnelle, ce geste vaut parfois comme instant dont il faut témoigner, à la manière des lois, des contrats importants ou des traités internationaux que l’on immortalise par une photo ou une vidéo. Il a fallu plus de six mois d’une promotion riche en rencontres et en échanges pour que le spécialiste de signatures en tout genre face l’expérience de cette curieuse pratique qui consiste à filmer ses mains inscrire son prénom sur la page du livre pour les « poster » ensuite en ligne. Et quelques secondes à l’autre auteur pour saisir cette chance, et ajouter Scriptopolis à la liste des espaces de circulation.



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