Lutte de pouvoir
Paris, octobre 2019
Ils ont envahi nos rues et nos trottoirs sans que nous ne puissions rien y faire : c’était la modernité, la légèreté de la start-up, la mobilité sans entraves qui entraient enfin dans nos villes. Et puis sont apparus l’encombrement, les nuisances, les plaintes, au point même d’amener les villes à réglementer et les entreprises à tenter de domestiquer leurs clients.
Mais la liste des fléaux associés à ces flottes sans port n’a cessé de s’allonger : exploiteuses de travailleurs précaires nocturnes, productrices massives de gaz à effet de serre, causes d’accidents de la route, symboles d’obsolescence programmée et même depuis peu briseuses de grève. Face à tant de maux, certains réinvestissent donc l’action directe.
Ils pourraient certes détruire ces engins par la force, mais ils s’appuient plutôt sur leur plus grande faiblesse : les écrits ténus qui les raccordent à une vaste infrastructure de localisation, de paiement, de maintenance. Un marqueur ou une petite bombe de peinture en main, quelques instants d’inscription discrète suffisent pour rendre l’engin inutilisable. Dans cette lutte de pouvoir, l’ubiquité de la start-up conquérante est anéantie par une petite surface de haute densité optique.