Potable
Labarthe-sur-Lèze, juillet 2019.
Pas facile de s’adapter aux modes alimentaires. Encore moins aux niches qui s’élargissent et qu’il devient impossible d’ignorer. Prenez le monde de la bière artisanale. En quelques années, le consommateur moyen s’est trouvé submergé, jusque dans les supérettes les moins achalandées, d’innombrables nouvelles références qui ont fait chavirer tous ses repères. Adieu blondes, brunes, blanches et rousses, catégories qui avaient jusque-là bien facilité le marquage de ses goûts. Bonjour Stout, Sour, Pale Ale, Lager, Lambic, Saison, Quadrupel, et bien sûr Indian Pale Ale, nouvelle obsession des jeunes gens modernes. À tout cela il faut ajouter les styles, qui démultiplient encore les termes qui décrivent aujourd’hui les bières disponibles en magasin comme dans les bars. Comment s’en sortir ? Comme pour les vins, il existe bien entendu un vocabulaire précis, qui permet de faire le travail de circulation entre les sensations gustatives aux différences infinies (c’est la beauté des fabrications artisanales) et l’espace des formes partagées. La forte amertume caractéristique des bières très houblonnées par exemple peut être traduite en pointes florales, herbacées, fruitées ou boisées. Les houblons eux-mêmes dégagent des fragrances que l’on associe au pamplemousse, à la mangue, au fruit de la passion, ou encore au caramel. Les Stouts sont rapprochées quant à elle au café, etc. Au débutant, désireux de s’aventurer sur le vaste continent des produits des micro et autres nano brasseries, ces subtilités ne diront pas grand chose. Un critère, en revanche, les réconciliera avec le monde des connaisseurs : celui de la buvabilité. Qu’importe ce qu’entendent par là les experts, le terme ne fait pas de doute, et vaut d’être affiché à même le rayon du supermarché, en guise de mode d’emploi pour nouveau venu. Cette bière-ci, une session wheat ale, saura-t-il saisir dans son propre langage, elle se laisse boire.