Propre
Entre Paris et Marseille, novembre 2018
Dans les annonces à bord du train, on apprend maintenant les noms des personnes qui sont là pour assurer la bonne tenue de notre voyage : contrôleurs, conducteur, « barista »… Pour finir, un agent de propreté est parfois simplement prénommé, le moins visible dans la chaîne des travailleurs du rail. Comme souvent pour celles et ceux qui exercent des métiers au service des autres, son invisibilité fait partie du bon fonctionnement. Ils passent et repassent et agissent en continu, quasiment à l’insu des voyageurs.
Et pourtant, dans ce TGV comme dans d’autres, son action est rendue visible par une feuille autocollante inscriptible sur laquelle, passage après passage, il écrit l’heure. Preuve du travail pour ses employeurs, attestation pour les passagers, peu importe : il sort le marker à chaque fois qu’il ressort des toilettes. Mais à lire ces horaires, le doute surgit : le séparateur change, la forme des chiffres n’est pas exactement identique. S’agit-il de simples variations pour combattre l’ennui ou faut-il prendre le « nous » affiché au sérieux ?
Le train arrive bientôt, il valait mieux puisque la place allait manquer. Et puis d’autres agents nettoieront, y compris ceux chargés de l’effacement de la feuille. Parce que les marques même du cycle de nettoyage doivent disparaître pour garantir la propreté.