Publications
Internet, mars 2022
Dans le monde académique, le verbe publier embrasse, de plus en plus, deux sens distincts. D’une part, il s’agit de rendre public, de partager des connaissances produites par le biais de notes de blogs, de manuscrits de travail ou encore de preprint, toutes formes n’impliquant pas ou peu de certification par les pairs. D’autre part, il s’agit de produire un travail spécifique de certification et de mise en forme, réalisé par un support de publication, des équipes internes à un éditeur, une société savante, une revue. Dans le premier cas, on est censé favoriser la rapidité, le contenu, l’échange ; dans le second, la préférence va pour la forme stabilisée, archivable, pérenne, qui efface les traces de construction, l’existence de versions successives.
Mais il arrive que les deux pratiques et leurs infrastructures scripturales s’emmêlent. Contre toute attente, c’est ici le titre de l’article qui livre le travail à l’oeuvre lors des échanges entre la revue et les auteurs, les multiples intervenants, la nécessité du montage matériel de l’article, le tout en police grassée. Faut-il se réjouir du surgissement des coulisses sur le devant de la scène ou se désoler que l’article, aussi mal mis en forme dans sa version of record, ait pu être validé ? Quoi qu’il en soit, cette capture d’écran reflète un état passé de la publication. Après 10 jours et quelques centaines de tweets au ton ironique, l’éditeur a produit une correction, signalant « l’erreur de titre » et donc une nouvelle version de l’article, à la titraille bien plus terne.
Les lecteurs attentifs tiqueront sans doute sur la dernière phrase de cette courte correction : « The original article has been also been corrected. » Encore une erreur de typographie de la part des sous-traitants de la multinationale de l’édition, mais entraînera-t-elle à son tour, dans un feuilletage intertextuel, une correction de la correction ?