Renforcement
Le département de la Drôme fait partie des espaces typiques dans lesquels les néo-habitant·e·s viennent chercher les « plaisantes perspectives » d’un paysage de campagne et une vie qu’iels espèrent plus conforme à leurs aspirations au ralentissement que la vie urbaine. Les petites annonces d’échange de graines de kéfir et de stages de yoga sont lisibles sur les murs des espaces de coworking et dans les sympathiques cafés qui leur permettent de se rassembler et de ne pas abandonner leur emploi en ville. En quête de ces paysages « authentiques » et dotés d’un revenu supérieur à la moyenne, iels délaissent les centres-bourgs jugés sombres et étriqués et participent, presque sans y penser, au mitage des terres agricoles par des maisons d’habitation individuelles.
Dans cette petite commune, un groupe WhatsApp centralise les informations concernant les événements à destination des néoruraux et des vacancier·e·s et cristallise un conflit entre les habitant·e·s. Ainsi, sur les portes de nombreuses maisons de la vieille ville, des Crestois·es ont gravé une douzaine de panneaux moquant les pratiques alternatives des nouvelles et nouveaux venu·e·s. C’est ainsi que l’on peut lire les noms parodiques de trois « capilotractologues certiffiés (sic.) » prodiguant du « conseil en pilosité choisie ».
Ici, comme ailleurs, se joue un conflit de grande ampleur entre les groupes porteurs d’idéaux de retour à la nature, de décroissance et de développement personnel et ceux qui considèrent leurs pratiques comme irrationnelles et porteuses d’une régression. Or, ce dont témoigne ce panneau, c’est que la rencontre de ces groupes n’a pas amené la reformulation d’un idéal commun, mais, tout au contraire, l’explicitation et le renforcement d’un paradoxe de modernité.