Reproduction
Agen, mars 2019.
Le train arrive en gare, amorçant le va-et-vient des personnes qui descendent et qui montent. Elles arrivent dans le wagon toutes les quatre ensemble, vêtues de la même jupe longue bleue marine. Deux d’entre elles s’assoient en face de moi. Après avoir salué leurs parents sur le quai, elles sortent leurs différents livres et cahiers, sous la responsabilité de l’ainée. Le cahier de texte comme guide, celle-ci parcourt la liste et vérifie auprès de ses sœurs que tous les exercices sont terminés et les leçons bien apprises. Elle prend son temps, le trajet étant propice à une telle vérification. En quelques minutes, les deux petites tables du wagon sont recouvertes d’écrits imprimés et manuscrits relatifs à différentes matières : géographie, mathématique, musique… Une atmosphère studieuse s’installe. Les deux fillettes qui me font face sortent alors un cahier de correspondance et une feuille de papier calque quadrillé. Sans explication supplémentaire, l’une lance à l’autre : “alors laquelle est plus facile à refaire, celle de papa ou celle de maman ?” Crayon en main, elle reproduit la signature choisie avec beaucoup d’application sur le calque. Une étape préalable pour en suivre fidèlement la forme avant de l’apposer directement sur la feuille du cahier. À l’heure du copier-coller à tout bout de champs, les technologies d’écriture et de falsification les plus séculaires n’ont pas perdu de leur vigueur ; elles surgissent même au cœur des situations les plus anodines.