Santé publique
Paris, janvier 2014.
« Le sida ne passera pas par moi », « 5 fruits et légumes par jour », « boire ou conduire, il faut choisir », « les antibiotiques, c’est pas automatique », nous nous sommes habitués à ces ritournelles de la santé publique. Pour transformer les comportements, rien ne vaut un beau slogan. Mais ces mots, parce qu’ils deviennent familiers, perdent de leur pouvoir de prescription et même, parfois, ne sont plus qu’un marqueur générationnel parmi d’autres, une formule dont le sens premier a disparu.
Pour faire face à cette banalisation, il faut donc frapper fort et afficher littéralement les morts au bord des routes, ou entourer les objets mêmes du tabac de slogans supposément anxiogènes : « fumer provoque l’impuissance », « fumer tue ». Mais entre la diffusion des suremballages en carton pour les paquets de cigarette et l’addiction du fumeur, même les mots les plus crus ne semblent plus suffire.
Et puis vient cette image sur la porte d’un magasin vendant des « cigarettes électroniques ». L’horrible cigarette est bien là, mais associée à une locution pour le moins improbable : « produits sans goudron ». Et puis en-dessous ce slogan énigmatique : « le plaisir et rien d’autre ». Quoi d’autre : la fumée ? L’odeur ? L’haleine ? L’impuissance ? Le cancer ? la mort ? Comme le savent bien les publicistes et propagandistes, le pouvoir des mots repose souvent moins sur ce qu’ils pointent que sur ce qu’ils laissent imaginer au lecteur.