Stationnement
Paris, mai 2019.
L’engin fin est vite devenu familier dans nos rues : la trottinette électrique urbaine à disposition, c’est la mobilité libérée dans sa pureté. Partir d’où on veut, aller où on le souhaite, par le trajet de son choix, avec un minimum de compétences, d’effort, d’investissement et de contraintes. Symétriquement, sa silhouette suscite immédiatement les critiques des autres habitants des villes : dangereuse, envahissante, polluante dans sa conception et sa maintenance, si nuisible qu’elle est devenue en quelques mois l’objet de conflits politiques à un an des élections municipales.
Trop c’est trop : après moult plaintes et tribunes, la Mairie annonce qu’elle va prendre des mesures règlementaires (interdictions, taxations) mais qu’elle a déjà pris langue avec les entreprises lançant leur flotte dans l’espace public. Et voilà donc qu’au fin cou d’un de ces véhicules est accrochée une large étiquette pour matérialiser cette nouvelle posture des pouvoirs publics.
Comme à l’habitude dans ce capitalisme de plate-forme, tout repose sur les usagers : leur liberté de mouvement n’est pas encore entamée, seule celle du stationnement de leur engin est limitée, gênant voitures, scooters et vélos à la place des électeurs piétons. Mais une fois pris l’engin et lancés à pleine vitesse, l’étiquette détachable suffira-t-elle à faire entrer dans le protocole des usagers qui se sont jusqu’alors moqués du sort de leur monture une fois à bon port ? Ou faudra-t-il aux entreprises inventer un nouveau métier, celui de signaleur, qui enverra SMS et courriels pour localiser les engins mal placés comme le suggère l’encadré vert ?